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La peur & ses deux routes cérébrales



Qu’est-ce que la peur ?


La peur fait partie des émotions de base universelle au même titre que la colère, le dégoût, la joie, la tristesse, ….

État émotionnel intense et aversif, la peur permet à notre organisme de se préparer pour faire face à une menace réelle et immédiate (Öhman, 2000), c’est la raison pour laquelle on dit que la peur a une valeur adaptative. Nous sommes capables de détecter n’importe quelle menace en quelques millisecondes (Méndez-Bértolo et al., 2016).

Non seulement très rapide, mais également automatique, dans le sens où elle ne nécessite pas d’attention, la peur provoque des réponses instinctives (Ohman et al., 2001).



 

Cerveau et peur : ¿ Que pasa ?


Quand un danger est détecté par notre organisme, ce stimulus va d'abord atteindre le thalamus.

À partir de là, il sera pris en charge par deux routes cérébrales différentes et en parallèle (c’est-à-dire qu’elles travailleront en même temps) :

  • La route courte (la voie thalamo-amygdalienne)

  • La route longue (voie thalamo-cortico-amygdalienne)



La route courte est la plus rapide pour nous permettre de réagir le plus vite possible, le stimulus (ici le danger détecté) active l'amygdale faisant ainsi naître des réactions émotionnelles. Plus rapide mais moins précise ! Elle véhicule une perception grossière de la situation, car elle active l’amygdale avant même que l'intégration perceptuelle n'ait eu lieu et que le système ait le temps de se représenter dans sa totalité le stimulus. C’est grâce et à cause de cette route courte que nous nous figeons, sursautons, sautons, courons, immédiatement face à un son très fort ou un animal dangereux


L’amygdale répond au danger avant même que nous n’ayons véritablement compris ce qui nous a fait peur !

En même temps, le stimulus a aussi emprunté la route longue, il a d’abord activé le cortex sensoriel primaire (traitement de la forme, couleur, son, …. du danger). Toutes ces informations sont ensuite transmises au cortex associatif unimodal pour les associer les unes aux autres et avoir une représentation complète et totale du danger. Avec un temps de retard, le stimulus maintenant bien représenté atteint à son tour l'amygdale qui prend le temps cette fois-ci, d’analyser plus en profondeur le stimulus pour préciser s’il s’agit d’un véritable danger. Pour ce faire, l’amygdale et les aires associatives communiquent avec l’hippocampe, c’est-à-dire notre mémoire. L’hippocampe permet de comparer ce nouveau danger à ceux déjà rencontrés.

La route longue permet de confirmer qu’il s’agit donc bien d’un danger, mais cette confirmation arrive quelques fractions de seconde plus tard que la réponse de la route courte ….

Des fractions de seconde qui peuvent s'avérer fatidiques !


 

Une grosse peur (et bêtise)


L’une des rencontres les plus menaçantes que j’ai pu faire dans ma vie (il y en a eu quelques-unes, mais celle-là était particulièrement dangereuse) s’est passée au Costa Rica. Et disons-le de suite, la grande majorité des frayeurs que j’ai eu ont eu lieu dans ce pays magnifique.



J’avais 18 ans et étais en stage d’éco-tourisme, en plein cœur du parc national du Guanacaste, un sentier de 3 h 30 dans la jungle devait être vérifié et préparé avant l’arrivée de randonneurs.

Cela faisait déjà plus d’un mois que je travaillais dans ce parc et pourtant…. en entendant que ce sentier comportait une partie plage, mon cerveau a dû se mettre en pause, parce que je suis partie en vadrouille habillée d’un short court, d’un débardeur, de sandales de plage, mon maillot déjà sur moi (vous l’aurez compris, ça commence mal !).

Je mets d’ailleurs l’entière responsabilité de cette désastreuse décision vestimentaire sur une insolation arrivée quelques jours auparavant (comme quoi, on n’apprend pas toujours de ses erreurs).


Enfin bref, me voilà partie en randonnée, habillée comme une touriste en pleine jungle, la meilleure façon donc de me faire agresser par une centaine de moustiques voraces (et là, ce n’est pas le petit moustique du sud de la France dont on parle, je vous parle du moustique de compétition).

Au bout de 15 minutes, j’étais criblée de piqûres, dès que mon pied touchait le sol, ils s’envolaient en essaim pour aller sur l’autre jambe et recommençaient ce manège à chaque impact de marche. Un bref moment de soulagement que j’ai voulu accentuer, j’ai marché plus fort, en tapant bien le pieds à terre à chaque pas (une véritable marche militaire) et pour associer l’utile à l’agréable, je marchais sur les branches mortes (je ne sais pas vous, mais j’adore le bruit des branches qui craquent – chacun son délire).


Jusqu’à là, rien de bien grave, je dirai même une situation plutôt comique accompagnée d’une bonne leçon !


Mais qui s’est transformée, en quelques secondes en une situation beaucoup moins drôle...

Il s’avère que les émissions National Geo ont raison ! Les animaux sont extrêmement performants quand il s’agit de se camoufler et les serpents ne font pas exception à la règle ….

Après une heure de marche (la peau tellement criblée de piqûres que j’avais abandonné l’idée du bikini sur la plage) et au moment de continuer ma cadence militaire, j’ai réalisé (le pied en l’air, prêt à toucher le sol) que ce que j’avais pris pour une grosse branche morte était en fait …. un fer de lance en pleine sieste digestive. Ce tristement célèbre serpent d’Amérique du Sud dont le venin peut tuer un homme, était posé de tout son long en plein milieu du sentier !


Ça n’a pas loupé, il s’est automatiquement mis en position de défense (mes petits orteils à l’air libre étaient une proie de choix), tétanisée, j’ai dû rester quelques secondes paralysée, le pied en l’air en pensant que j’allais mourir (douloureusement) à cause d’une mauvaise décision vestimentaire, en plein milieu de la jungle à 57 km de l’hôpital le plus proche.

Je n’ai pas particulièrement peur des serpents, mais j’ai peur de leurs venins (encore une fois grâce à National Geo). Heureusement pour moi, ce gros serpent au ventre bien rempli, moins rapide que d’habitude, moins vif aussi, (la chance était de mon côté) m’a laissé le temps de faire un petit saut en arrière hors de sa portée pendant qu’il disparaissait déjà doucement dans la jungle.

Autant vous dire, que ça a été la dernière fois où j’ai tenté le short et sandales en pleine jungle. J’avais beau mourir de chaud dans ces fameuses guêtres à serpent au moins je pouvais marcher en me préoccupant davantage de ce qu’il pouvait y avoir dans les arbres, plutôt qu’au sol…


Mais, vous l’aurez compris ressentir de la peur est vital pour notre survie et c’est la raison pour laquelle notre cerveau dispose de ces deux routes afin d’être prêt à faire rapidement face aux peurs.


 

Nombreuses sont les choses effrayantes dans le monde, mais ce que nous craignons le plus, n’a généralement rien à voir avec des serpents venimeux, des araignées, des masques d’ Halloween,….


Ce sont les pensées qui nous trottent dans la tête qui nous effraient le plus…



Différence entre peur, anxiété et angoisse


Peur, angoisse et anxiété sont souvent confondues. Si on s’intéresse aux réactions physiques qu’elles suscitent, elles peuvent être considérées comme différent niveaux ou degrés, d’un même état. Cependant, quand on s’intéresse aux réactions psychologiques, il s’agit de trois réalités bien distinctes.

  • La peur est une réaction normale et adaptative à un danger immédiat et réel (« entendre un coup de feu, ou voir une grosse forme bouger en forêt »)

  • L’anxiété ne nécessite pas que le danger soit immédiat ou même réel (« avoir peur de ne pas être aimé, d’être jugé »).

  • L’angoisse, quant à elle, nécessite que le danger soit réel, mais dans ce cas le danger n’est pas immédiat, il est imminent (« une réunion de travail que l’on redoute, devoir parler en public »).

Peur, anxiété et angoisse différent sur la réalité et l’immédiateté du danger, tout comme sur les réponses cérébrales qu’elles engendrent, mais elles sont aussi voisines et entretiennent des liens étroits, comme une même émotion, ressentie à des degrés différents.


Qu'elles soient appelés peur, anxiété ou angoisse, cela reste des peurs sous différentes formes.

Et bien que les peurs soient par nature des freins ... Des freins nous empêchant de rentrer en collision avec un danger, elles peuvent se transformer en limites !


Mais que le danger soit réel ou non, immédiat ou imminent, certaines peurs sont uniquement faites pour être transformées en moteur !



 

Références:


Öhman, A., Hamm, A., & Hugdahl, K. (2000). Cognition and the autonomic nervous system: Orienting, anticipation, and conditioning.


Méndez-Bértolo, C., Moratti, S., Toledano, R., Lopez-Sosa, F., Martínez-Alvarez, R., Mah, Y. H., ... & Strange, B. A. (2016). A fast pathway for fear in human amygdala. Nature neuroscience, 19(8), 1041.


Öhman, A., Flykt, A., & Esteves, F. (2001). Emotion drives attention: detecting the snake in the grass. Journal of experimental psychology: general, 130(3), 466.

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